Pyrénées

Continuons maintenant notre tour de France des randonnées par des montagnes découvertes par moi peu après les premières vacances auvergnates: les Pyrénées.

Je faisais mon service militaire dans le Val de Loire, comme je l’ai déjà dit, et cette période me valut plusieurs virées touristiques dans cette belle région et aux environs. Or, il se trouva qu’il fut proposé à mon régiment de participer à un pèlerinage à Lourdes: une aubaine à ne pas manquer! Je m’inscrivis donc sans hésiter. Une fois arrivé dans la cité de la Vierge, je ne fus pas long à fausser compagnie aux autres et à prendre un train qui me mena à pied d’œuvre dans la ville de Cauterets.

Et ce fut alors ma découverte des premiers sommets élevés auprès desquels mes monts d’Auvergne, visités quelques mois auparavant, faisaient figure de collinettes…

En quarante-huit heures, j’eus le temps de monter, par la magnifique vallée du Jeret, au Pont d’Espagne, au lac de Gaube et, de là, sur une crête le dominant: ce fut un émerveillement et une révélation. Je redescendis sous la forme d’un « mordu » de la montagne et bien décidé à redécouvrir encore les joies des balades montagnardes que cette brève escapade m’avait révélées.

Pour cette région aussi, c’est une chanson de Charles Trenet qui réveille en moi de bien agréables souvenirs nuancés d’une pointe de nostalgie: Mes jeunes années courent dans la montagne…

Pour respecter l’ordre chronologique que j’ai voulu m’imposer dans ce livre de mémoires, j’ai entamé le chapitre « Montagnes » par les Pyrénées. Pourtant je fus long à y revenir car les Alpes, plus proches de Paris, furent longtemps le théâtre le plus fréquent de nos sorties patagonnes.

Pour terminer la revue de mes principales randonnées pyrénéennes, nous ferons donc un saut dans le temps puisque la deuxième vadrouille n’eut lieu qu’une quinzaine d’années plus tard.

C’était une vadrouille à quatre: les « cousins » Blier, Françoise et moi. Nous nous étions donné rendez-vous à Luchon car nos amis, partis avant nous, avaient déjà passé quelques jours dans la région avant de nous rejoindre.

Ensemble nous avions donc franchi la frontière en voiture pour, ensuite, partir à pied dans le Val d’Aran pour environ une semaine de découvertes espagnoles.

Outre un climat très ibérique, qui mit la sieste à la mode pour certains d’entre nous, cette promenade fut marquée par une grande impression de sauvagerie et de dépaysement avec une succession de camps plus beaux les uns que les autres parmi une région de lacs aux eaux d’une limpidité de rêve.

Les cousins revenus en France, Françoise et moi avions continué encore quelques jours dans la région des Encantats, autrement dit « les Enchantements » au nom évocateur tout à fait justifié. Ce fut encore une féerie de lacs montagnards dans une solitude magnifique.

Bien plus tard, par le Col de Riou, entre Cauterets et Luz-Saint-Sauveur, j’ai effectué en solo une jonction très belle entre les deux vallées des gaves de Cauterets et de Gavarnie. J’ai encore en mémoire ma halte, pour un casse-croûte, sur la crête sommitale à deux pas d’un reste de névé dont les limites se perdaient dans la brume qui stagnait autour des cimes proches…

À part ces trop rares randonnées pédestres, c’est nettement plus tard et à vélo que j’ai parcouru les Pyrénées.

En quatre itinéraires échelonnés sur quelques années, j’ai ainsi découvert la Côte Vermeille en venant du Languedoc, la Côte Basque en venant des Landes, et longé par deux fois cette chaîne frontière dans le sens longitudinal, de Bayonne à Montréjeau puis de cette dernière ville jusqu’à Collioure.

Côté Atlantique, ce fut une randonnée assez montagnarde avec le franchissement des cols du Tourmalet, d’Aspin, de Peyresourde et de Luchon, entre autres. Par contre, l’autre moitié, celle finissant sur la Méditerranée, n’emprunta que des cols ne dépassant que de peu les mille mètres, car, bien qu’en juin, je rencontrai un ciel froid et brumeux avec un plafond bas peu propice à l’itinéraire en belvédères que j’avais choisi à l’origine.

Je me remémore avec délectation la montée au Tourmalet par un frais matin ensoleillé de Septembre et la satisfaction du devoir accompli devant la tasse de thé savourée à la table d’un bistrot en arrivant au col. Peu après, au terme d’une descente style « piéton miraculé », je déjeunais d’un succulent sandwich jambon-tomate à la terrasse d’une épicerie-buvette à Sainte-Marie-de-Compan: j’étais seul avec mon plaisir pour admirer la sympathique place de ce village où l’heure méridienne avait fait le vide.

Un peu plus tard, quelle joie d’admirer le merveilleux panorama du haut du second col de cette journée, celui d’Aspin, qui révèle brusquement l’immense panorama vers l’Espagne et les mille sommets de ce que les agences de tourisme appellent, non sans raison,  » la Frontière Sauvage ».

Au cours de cette balade, je m’offris une incursion en Espagne par le col du Portillon de Luchon ce qui me permit de retrouver le Val d’Aran découvert une trentaine d’années plus tôt. Que de changements depuis, en particulier à Viela que nous avions connue alors qu’elle était une petite bourgade pittoresque et aujourd’hui devenue un centre touristique bourgeonnant dans tous les azimuts plein d’hôtels, de fast-foods, de magasins de souvenirs et autres pièges à touristes…

La seconde moitié de ma transversale pyrénéenne fut gênée par le mauvais temps, je l’ai dit.

J’en conserve pourtant de très bons souvenirs comme celui de ce camp, pourtant réalisé sur un terrain municipal, près de Saint-Bertrand-de-Comminges au lieu-dit Es Pibious (les Peupliers).

Cet endroit, bien qu’emplacement officiel, est très bien situé avec vue sur la massive église de Saint-Bertrand juchée sur sa colline. De plus, hors saison, je n’en partageais l’espace qu’avec deux ou trois autres campeurs en tout et pour tout.

Il y eut aussi la magnifique descente sur la pittoresque ville de Quillan dans la vallée de l’Aude. Je remontai ensuite les gorges remarquables de ce cours d’eau pour camper dans la Forêt de Carcanet au milieu d’une hêtraie assez imprévue dans cette région méridionale. Le lendemain, après le passage du Col de la Quilliane, j’atteignis la haute vallée de la Têt, site paradisiaque situé en aval du Lac des Bouillouses.

Ce lac, très beau bien qu’artificiel, avait été pour Françoise et moi, un très beau terrain de randonnée quelques années plus tôt.  Nous y avions réalisé un camp splendide avec une vue imprenable et dans une ambiance de complète sauvagerie. Des troupeaux de chevaux en liberté faisaient de la figuration touristique aux alentours comme ce n’est pas rare dans ces montagnes pyrénéennes qui prennent parfois ainsi des allures de Far-West.

Après mon second passage au lac des Bouillouses, commença une descente de plus de deux mille mètres de dénivelé jusqu’à la Méditerranée. C’est bien le type de parcours pour lequel on peut utiliser, une fois de plus, l’expression de « piéton miraculé » appliquée à un cycliste…

En effet, presque toute la matinée se passa en roue libre sur cette route qui longe la Vallée de la Têt jusqu’à Villefranche-de-Conflent. Ce ne fut qu’après cette pittoresque ville fortifiée que, dans la plaine retrouvée, l’obligation de pédaler reprit ses droits.

Cette très belle promenade se termina le lendemain à Collioure où je faisais ainsi la jonction avec le tracé d’une randonnée antérieure: quelle jolie ville pour y terminer des vacances!

Autant pour les souvenirs de cette randonnée que pour sa grâce indiscutable, Collioure a dans mon cœur une place privilégiée: c’est un de mes « villes saintes »!